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Par renal le 3 Février 2011 à 09:36
D’un vanneur de blé aux vents
A vous, troupe légère,
Qui d’aile passagère
Par le monde volez,
Et d’un sifflant murmure
L’ombrageuse verdure
Doucement ébranlez :
J’offre ces violettes,
Ces lis et ces fleurettes,
Et ces roses ici,
Ces vermeillettes roses,
Tout fraîchement écloses,
Et ces œillets aussi.
De votre douce haleine
Eventez cette plaine,
Eventez ce séjour,
Cependant que j’ahanne
A mon blé que je vanne
A la chaleur du jour
(Joachim du Bellay)
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Par renal le 2 Février 2011 à 08:38
Chemin de campagne
Je trace mon chemin
De labours solitaires ;
C'est un sentier d'achèvement
Qui m'exhorte à louer
Au plus profond de moi
La patience de ma terre.
Je m'ouvre aux appels de septembre :
J'entends l'humus en son repos
Fixer les échéances saisonnières
Et dire sa fidélité
Au destin des semailles.
Le soleil est chair de sa chair,
Promesse des moissons
Dont les racines
Déjà sécrètent les couleurs.
Mais il faudra laisser passer les neiges
Avant les grandes éclosions.
Je n'imagine pas,
Je transcris les pouvoirs
Des sèves qui nous hantent
Et parcourent nos veines
Pour engendrer d'autres instants de vivre.
Je n'imagine pas,
Je dessine une carte paysanne
Dont les chemins appartiennent au ciel
Comme ceux qui s'allongent sous mon pas.
(Edmond Vandercammen)
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Par renal le 1 Février 2011 à 08:20
L’ombre
Aux jours où la chaleur arrêtait toute vie,
Quand le soleil, sur les labours exténués,
Pressait contre son cœur le vignoble muet,
A l'heure où des faucheurs l'armée anéantie
Écrasait l'herbe sous des corps crucifiés,
Seul debout, en ces jours de feu et de poussière,
En face du sommeil accablé de la terre,
Assourdi par le cri des cigales sans nombre,
Je cherchais votre cœur, comme je cherchais l'ombre.
(François Mauriac)
(Thorame-Basse)
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Par renal le 31 Janvier 2011 à 11:13
Comment
Il y aura toujours dans l’automne
Une pomme sur le point de tomber.
Il y aura toujours dans l’hiver
Une fontaine sur le point de geler.
Que les corbeaux
S’enfuient de peur à notre approche,
C’est leur droit. Nous pouvons aller.
De l’espoir il y en aura
Sur les rameaux.
Et puis, nous ne sommes pas malades
De la terre.
L’ennemie
Nous le connaissons.
(Eugène Guillevic)
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Par renal le 30 Janvier 2011 à 17:48
Paysage
Pas une feuille qui bouge,
Pas un seul oiseau chantant,
Au bord de l'horizon rouge
Un éclair intermittent ;
D'un côté rares broussailles.
Sillons à demi noyés,
Pans grisâtres de murailles,
Saules noueux et ployés ;
De l'autre, un champ que termine
Un large fossé plein d'eau,
Une vieille qui chemine
Avec un pesant fardeau ;
Et puis la route qui plonge
Dans le flanc des coteaux bleus,
Et comme un ruban s'allonge
En minces plis onduleux.
Théophile Gautier
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Par renal le 29 Janvier 2011 à 09:35
On entendait le cri
On entendait le cri perçant des martinets
De la chambre déserte et close où je venais
Quand le soleil de juin accablait les sureaux
Et que les magnolias mouraient dans l'air trop chaud
Avec les lis brûlés et les rosés trémières.
La chambre avait un vieux bureau lourd de poussière,
D'anciens dessins coloriés pendaient aux murs
Naïvement et, sur les chaises dépaillées,
Je me souviens d'un triste herbier, doux livre obscur,
Avec ses fleurs cueillies aux collines mouillées
Les soirs d'automne ou les après-midi d'été
Par les jardins déserts et dans l'aridité
De la campagne avec le cri sec des criquets.
Tout cela somnolait dans la chambre endormie.
Or je sais que si j'y retournais à présent
Je trouverais, comme jadis à mes treize ans,
Aux pages du vieux livre mon enfance blottie
Presque étrangère sous la poussière du temps.
Francis CARCO
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Par renal le 27 Janvier 2011 à 11:41
ODELETTE
Un petit roseau m'a suffi
Pour faire frémir l'herbe haute
Et tout le pré
Et les doux saules
Et le ruisseau qui chante aussi ;
Un petit roseau m'a suffi
A faire chanter la forêt.
Ceux qui passent l'ont entendu
Au fond du soir, en leurs pensées,
Dans le silence et dans le vent,
Clair ou perdu,
Proche ou lointain...
Ceux qui passent en leurs pensées
En écoutant, au fond d'eux-mêmes.
L'entendront encore et l'entendent
Toujours qui chante.
Il m'a suffi
De ce petit roseau cueilli
A la fontaine où vint l'Amour
Mirer, un jour,
Sa face grave
Et qui pleurait,
Pour faire pleurer ceux qui passent
Et trembler l'herbe et frémir l'eau ;
Et j'ai, du souffle d'un roseau.
Fait chanter toute la forêt.
(Henri de Régnier)
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Par renal le 26 Janvier 2011 à 08:33
Un oiseau
Un oiseau chante à sa façon
pour accompagner le maçon
en haut de son échafaudage
le coq souffle dans son alto
la dame éreinte son piano
et ça fait un sacré tapage
à quoi s'ajoutent le marteau
du forgeron et les autos
et les camions dans le virage
sans parler de dix-huit radios
tévés ou transistors ruraux
on croit entendre vingt orages
Assis sur son banc un vieux sourd
bourre une pipe d'un doigt gourd
en écoutant de son village
le bruissement très très lointain
qui s'accorde tout à fait bien
avec le calme de son âge
(Raymond Queneau)
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Par renal le 24 Janvier 2011 à 21:37
IL FERA LONGTEMPS CLAIR CE SOIR..
Il fera longtemps clair ce soir, les jours allongent,
La rumeur du jour vif se disperse et s'enfuit,
Et les arbres, surpris de ne pas voir la nuit,
Demeurent éveillés dans le soir blanc, et songent...
Les marronniers, sur l'air plein d'or et de lourdeur, Répandent leurs parfums et semblent les étendre ;
On n'ose pas marcher ni remuer l'air tendre
De peur de déranger le sommeil des odeurs.
De lointains roulements arrivent de la ville...
La poussière, qu'un peu de brise soulevait,
Quittant l'arbre mouvant et las qu'elle revêt,
Redescend doucement sur les chemins tranquilles.
Nous avons tous les jours l'habitude de voir
Cette route si simple et si souvent suivie,
Et pourtant quelque chose est changé dans la vie,
Nous n'aurons plus jamais notre âme de ce soir...
(Anna de Noailles)
(Guadeloupe)
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Par renal le 23 Janvier 2011 à 16:56
PAYSAN
Rien qu'à le voir, on sait qu'il a conduit des charretées de paille, accompagné le balancement liturgique des attelages. Il a la démarche en prose du Magnificat. Vieux renard, il sait faire chanter le vin. Son champ est une ville. Il porte l'heure sur l'épaule, l'aube à l'encolure. Ses frissons peuplent les peupliers. A sa lèvre naît l'églantine. Intact comme une journée, il construit.
(Jean Malrieu)
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