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Par renal le 26 Juillet 2014 à 08:57
Dors
Dors, mignon chat blanc, dors
Reste à ronronner, reste couché,
Et ferme un peu tes yeux semés d'or ;
Les souris montrent leur nez aux trous du plancher.
Dors, mignon chat blanc, mignon chat gris, Avec ton ruban de soie au cou ; Les souris vont venir, les jolies souris Que tu griffes à petits coups.
Elles vont s'attabler autour
De la bonne assiette au gâteau :
Dors, mignon chat blanc à pattes de velours,
Et ne t'éveille pas trop tôt.
Tristan Klingsor
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Par renal le 23 Juillet 2014 à 09:08
Un chat perdu
Un chat perdu rôdait
Aux portes des maisons.
Une vieille cousait,
Assise à son balcon.
« O vieille ! dit le chat,
Je vis de peu de chose :
Deux pétales de rose
Comblent mon estomac. »
« En ce cas, dit la vieille
Entrez, pauvre matou ;
Dormez dans ma corbeille,
Faites comme chez vous. »
Mais allez croire un chat !
Dès qu’il fut chez la vieille,
Il lui mangea jusqu’à
L’ouate de ses oreilles.
Maurice Carême
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Par renal le 20 Juillet 2014 à 08:54
Presse papier
C’est un petit chat noir, effronté comme un page.
Je le laisse jouer sur ma table, souvent,
Quelquefois il s’assied sans faire de tapage ;
On dirait un job presse-papier vivant.
Rien de lui, pas un poil de sa toison ne bouge.
Longtemps, il reste là, noir sur un feuillet blanc,
A ces matous, tirant leur langue de draps rouge,
Qu’on fait pour essuyer les plumes, ressemblant.
Mais le voilà qui sort de cette nonchalance,
Et faisant le gros dos, il a l’air d’un manchon ;
Alors, pour l’intriguer un peu, je lui balance,
Au bout d’une ficelle invisible, un bouchon.
Il fuit en galopant et la mine effrayée,
Puis revient au bouchon, le regarde, et d’abord
Tient suspendue en l’air sa patte repliée,
Puis l’abat, et saisit le bouchon, et le mord.
Je tire la ficelle, alors, sans qu’il la voie ;
Et le bouchon s’éloigne, et le chat noir le suit,
Faisant des ronds avec sa patte qu’il envoie,
Puis saute de côté, puis revient, puis s’enfuit.
Mais dès que je lui dis : « Il faut que je travaille ;
Venez-vous asseoir là, sans faire le méchant ! »
Il s’assied … Et j’entends, pendant que j’écrivaille,
Le petit bruit mouillé qu’il fait en se léchant.
Edmond Rostand
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Par renal le 17 Juillet 2014 à 08:32
Quel secret dort
Chatte blanche, chatte sans tache,
Je te demande, dans ces vers,
Quel secret dort dans tes yeux verts,
Quel sarcasme sous ta moustache.
Tu nous lorgnes, pensant tout bas
Que nos fronts pâles, que nos lèvres
Déteintes en de folles fièvres,
Que nos yeux creux ne valent pas.
Ton museau que ton nez termine,
Rosé comme un bouton de sein,
Tes oreilles dont le dessin
Couronne fièrement ta mine.
Pourquoi cette sérénité ?
Aurais-tu la clé des problèmes
Qui nous font frissonnants et blêmes,
Passer le printemps et l'été ?
Devant la mort qui nous menace,
Chats et gens, ton flair, plus subtil
Que notre savoir, te dit-il
Où va la beauté qui s'efface,
Où va la pensée, où s'en vont
Les défuntes splendeurs charnelles ?...
Chatte, détourne tes prunelles ;
J'y trouve trop de noir au fond.
Charles Cros
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Par renal le 12 Juillet 2014 à 09:44
Chats de partout
Je suis le chat de cimetière,
De terrain vague et de gouttière,
De Haute-Egypte et du ruisseau
Je suis venu de saut en saut.
Je suis le chat qui se prélasse,
A l’instant où le soleil passe,
Dans vos jardins et dans vos cours
Sans avoir patte de velours.
Je suis le chat de l’infortune,
Le trublion du clair de lune
Qui vous réveille dans la nuit
Au beau milieu de vos ennuis.
Je suis le chat des maléfices
Condamné par le Saint Office ;
J’évoque la superstition
Qui cause vos malédictions.
Je suis le chat qui déambule
Dans vos couloirs de vestibules,
Et qui fait ses petits besoins
Sous la porte cochère du coin.
Je suis le félin bas de gamme,
La bonne action des vieilles dames
Qui me prodiguent le ron-ron
Sans souci du qu’en dira-t-on.
Epargne-moi par vos prières
Le châtiment de la fourrière
Où finissent vos émigrés
Sans demeure et sans pedigree.
Henri Monnier,
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Par renal le 9 Juillet 2014 à 09:12
Chatons dans tous les coins
Chatons, chatons dans tous les coins,
Chatons mâchonnant mes lorgnons,
Chatons griffant mes pantalons,
Chatons partout sous les cousins,
Un chaton derrière, un chaton devant …
Comment seront-ils donc, quand ils seront grands ?
Chatons qui bataillent en tout lieu,
Chatons qui roulent le long des escaliers,
Un chaton sur ma tête,
Un chaton sur la galette,
Un chaton dans mon soulier…
Je ne peux pas le croire : ils ne sont que deux !
William Wondsworh
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Par renal le 8 Juillet 2014 à 08:30
Vieux frère
Mon chat, hôte de ma vieille maison,
De ton dos électrique arrondis la souplesse,
Viens te pelotonner sur mes genoux, et laisse
Que je plonge mes doigts dans ta chaude toison.
Ferme à demi, les reins émus d’un long frisson ;
Ton œil vert qui me raille et pourtant me caresse,
Ton œil vert semé d’or, qui, chargé de paresse,
M’observe d’ironique et bénigne façon.
Tu n’as jamais connu, philosophe, ô vieux frère,
La fidélité sotte et bruyante du chien :
Tu m’aimes cependant, et mon cœur le sent bien.
Ton amour clairvoyant, et peut être éphémère,
Me plaît, et je salue en toi, calme penseur,
Deux exquises vertus : scepticisme et douceur.
Jules Lemaître.
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Par renal le 6 Juillet 2014 à 08:55
Toilette
À l'œuvre maintenant ! Toilette et gratterie
L'absorbent tout entier. Le chat,
Si propre tel qu'il est, si bien peigné déjà,
Se lisse avec coquetterie.
Que par hasard un poil se colle sur sa langue,
Pour l'avaler, le miauleur
Grimace en mâchonnant, fait comme un beau parleur
Qui s'empêtre dans sa harangue.
A piochement de tête onduleux, brusque et drôle,
II se râpe le bas du cou ;
Des griffes et des dents il insiste beaucoup
Aux démangeaisons de l'épaule.
Son opération, d'un arrêt s'entrecoupe :
II tend son regard et son flair,
Et le col et les reins en arc, et la cuisse en l'air,
Lèche les abords de sa croupe.
Sans voir ce que la pluie en tapotant gribouille
Sur la crasse de son carreau,
II humecte longtemps le caoutchouc noiraud
De sa patte, et se débarbouille.
Éveillée à présent, mutine se détache
Sur un fond d'ombre vague aux clairs-obscurs tremblants,
Sa frimousse qui montre espacés et tout blancs
Les poils raides et droits lui servant de moustache.
Mais la pluie a cessé. Quelqu'un entre soudain.
Le matou sort d'un bond, gagne cour et jardin,
Et bientôt on le voit marchant à pas tranquilles
Au long du vieux chenal, sur la mousse des tuiles.
Maurice Rollinat,
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Par renal le 3 Juillet 2014 à 08:57
La lune
Dans la nuit qu'elle argente avec son regard blanc,
Faisant hurler les chiens et chanter les poètes,
La lune pend, légère, ainsi qu'un cerf-volant.
Au milieu des tuyaux longs et des girouettes
Qui dentellent les toits blancs de leur profil noir,
Chagrine, elle poursuit les chattes inquiètes,
En guettant les matous lascifs qui vont s'asseoir
Au bord de la gouttière, elle monte la garde
Devant ces diamants, les étoiles du soir.
Voici l'astre aux blancheurs métalliques qui farde
De craie, au fond du ciel, son masque glacial,
La Lune pâle et ronde, attirante et blafarde,
Comme un suave écu de cent sous idéal.
Louis Denise,
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