• Chanson du chat gris

     

    Heure très belle et très fine

    Où le soleil non pareil

    Qui décline

    Promène sur le mur de longues tresses d’or !

    Ok regarde ! sur le gazon

    Devant la maison.

     

    Le chat gris à la queue rayée,

    Qui, charmant tigre domestique,

    Lève une patte

    Délicate

    Et joue avec un moustique.

     

    Louis Codet

     

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  • Bleu et blanc

     

    Un petit chat bleu

    Semé de pois blancs

    Vit un gros rat blanc

    Semé de pois bleus.

     

    Leurs mignonnes queues

    Différaient de peu.

     

    Oui, mais seulement

    Le nez du chat bleu

    Etait tout tout blanc,

    Le nez du rat blanc

    Etait tout tout bleu.

     

    Leurs joues et leurs yeux

    Différaient de peu.

     

    Oui, mais seulement

    Un cil du chat bleu

    Etait tout tout blanc,

    Un cil du rat blanc

    Etait tout tout bleu.

     

    A cause de ce peu,

    De ce tout petit peu

    De blanc et de bleu

    Ils continuèrent

    A se faire la guerre.

     

    Maurice Carême,

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  • Chaussons gris

     

    Quel est ce chant quel est ce bruit

    Qui froufroute et qui bourdonne ?

    C'est la bouilloire qui fume ?

    Non, c'est un petit rouet qui tourne.

     

    Qui tourne.

    Quel rouet,

    Tourne pour son seul plaisir

    Et fredonne à ravir ?

    Celui qui loge dans la gorge

    De la chatte qui ronronne.

     

    Ecoute son murmure,

    Pense au rouet qui file

    Un fuseau qui tourne,

    Tourne et tourne

    Sur son fil endormi.

     

    Que va-t-elle faire, la chatte

    Quand elle aura fini

    De tourner son rouet,

    Avec tout ce fil ?

    Tricoter des chaussons ?

    Drôle d'idée un rouet

    Dans la gorge d'une chatte !

    Gris est son chaton

    Gris seront les chaussons

    Qu'elle va tricoter.

     

    Clara Doty Bâtes.

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  • Le lait

     

    Tout d'abord, de son nez délicat il le flaire.

    Le frôle ; puis, à coups de langue très petits,

    II le lampe, et dès lors il est à son affaire ;

    Et l'on entend, pendant qu'il boit un clapotis.

     

    Il boit, bougeant la queue, et sans faire une pause,

    Et ne relève enfin son joli museau plat

    Que lorsqu'il a passé sa langue rêche et rosé

    Partout, bien proprement débarbouillé le plat.

     

    Alors, il se pourlèche un moment les moustaches

    Avec l'air étonné d'avoir déjà fini ;

    Et, comme il s'aperçoit qu'il s'est fait quelques taches,

    II relustre avec soin son pelage terni.

    Ses yeux jaunes et bleus sont comme deux agates ;

     

    II les ferme à demi, parfois, en reniflant, Se renverse, ayant pris son museau dans ses pattes,

    Avec des airs de tigre étendu sur le flanc.

     

    Edmond Rostand

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  • Palissade

    Le chat noir de la palissade

    Promène son museau partout,

    C'est un pirate en ambassade.

    Le chat noir qui s'en vient chez nous.

    Dans le jardin ou sur le toit,

    En mille et une escapades,

    De tous côtés, il est le roi.

     

    Il est le tigre du Bengale

    Et le prince des maraudeurs,

    Sa moquerie est sans égale :

    Ce chat-là est un chapardeur.

     

    Il faut le voir, cet escogriffe,

    Ce gracile animal ingrat

    Qui lacère à grands coups de griffe

    Les détritus de papiers gras.

     

    Il mène sa vie à sa guise,

    Ne faisant que ce qui lui plaît,

    II se complaît dans des bêtises

    Qui ne valent pas un couplet.

     

    Et cependant si ce vaurien

    Ne commet que des incartades

    À la maison, on l'aime bien,

    Le chat noir de la palissade.

     

    Henri Monnier, Les Poèmes du Chat Noir, 1881-1886.

     

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  • La chanson  du chat noir

     

    L’entrée célèbre sur la cour

    S’appelle  « escalier de service ».

    Dans cette entrée, comme en son fief,

    Habite le Chat Noir.

     

    L’obscurité le protège, il cache

    Son rire moqueur dans sa moustache…

    Tous les chats chantent ou pleurent,

    Mais le Chat Noir, lui se tait.

     

    Il n’attrape plus les rats depuis belle lurette ;

    Ricanant dans sa moustache,

    Il nous attrape aux  belles paroles,

    A la rondelle de saucisson.

     

    Il n’exige ni ne prie ;

    Et seul son œil jaune brille.

    Chacun vient le servir de lui-même

    Et de surcroit lui dit merci.

     

    Il ne lâche pas un mot

    Ne fait que manger et boire.

    Quand ses griffes raclent le sol

    On dirait qu’il vous fend la gorge.

     

    C’est pour ça, faut croire, qu’est triste

    La maison où nous habitons.

    Il faudrait y mettre une lampe…

    Mais pas moyen qu’on se cotise.

     

    Boulat Okoudjava

     

    chat 2209

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  • Étude de chat

     

    Aujourd'hui depuis l'aube, ayant ripaillé

    Au vieux château qui le vit naître,

    II est, sur son fauteuil poudreux et dépaillé,

    Accroupi devant la fenêtre.

     

    Il pleuvasse un peu, mais pour ce craintif de l'eau

    L'ondée a trop de violence ;

    II reste au gîte, y  fait son ronronnant solo

    Dans la musique du silence.

     

    Confit en sa mollesse, il peine à s'étirer ;

    Piété, sort sa griffe, la rentre ;

    Pour le moment, sans puce, et gavé son plein ventre

    II n'a plus rien à désirer.

     

    Une poussière ayant picoté son nez rosé,

    II éternue, et comme un loir,

    II s'étend, paresseux, chargé de nonchaloir,

    Et genoux plies se repose.

     

    L'œil mi-clos, rêvassant plutôt qu'il ne sommeille,

    Gardant l'ouïe et l'odorat,

     

    II guigne le grillon du mur, flaire le rat,

    Écoute ronfler une abeille.

     

    Le temps passe, à la fin, de sieste en somnolence,

    Il s’endort, puis, se réveillant,

    Se rendort de nouveau, se réveille en bâillant,

    Tant qu’il sort de son indolence.

     

    Il toussote, se mouche et se désassoupit,

    Bombe son échine et la creuse

    En redressant sa queue alerte, tout heureuse

    D’avoir terminé son répit.

     

    Maurice Rollinat

    chat 2212

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  • Souvenir

     

    II siège au coin du feu, les paupières mi-closes,

    Aspirant la chaleur du brasier qui s'éteint ;

    La bouilloire bouillonne avec des bruits d'étain ;

    Le bois flambe, noircit, s'effile en charbons rosés.


     

    Le royal exilé prend de sublimes poses ;

    II allonge son nez sur ses pieds de satin ;

    II s'endort, il échappe au stupide destin,

    A l'irrémédiable écroulement des choses.


     

    Les siècles en son cœur ont épaissi leur nuit,

    Mais au fond de son cœur, inextinguible, luit

    Comme un flambeau sacré, son rêve héréditaire :

    Un soir d'or, le déclin empourpré du soleil,

    De fûts noirs de palmiers sur l'horizon vermeil,

    Un grand fleuve qui roule entre deux murs de terre.


     

    Hippolyte Taine,

     

    chat 2194

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  • Fable africaine

    Un vieux chat fort matois et un brin sournois avait accompli un lointain pèlerinage. De retour sur ses terres, il fit savoir aux rats et ratons du voisinage qu'habité de saintes pensées, il ne se nourrirait plus que de fruits et de lait. Au fil des jours et des saisons, rats, rates et ratons s'accoutumèrent à le voir plongé dans ses prières. Ayant désappris d'avoir peur, ils firent comme si eux et lui étaient de vrais amis. Or, un beau jour, alors que deux grosses rates dépourvues de malice s'était approchée le fieffé félin oublia tout de go son âge et ses pensées, prit son élan et saisit mesdames les rates d'un vif, violent et fatal coup de ses agiles pattes... Et, sans plus attendre, d'un bon coup de dents, il les croqua toutes deux, bien vivement.

    Moralité :un chat, même vieux, même pieux, reste un chat...

    Telle fut en tout cas la leçon donnée aux rates, rats et ratons, ce funeste jour-là.

     

    Fable africaine adaptée par Melchior de Chambilly, Trésor des veillées brionnaises, 1888.

     

    chat 2193

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  • L’esprit familier

     

    De sa fourrure blonde et brune

    Sort un parfum si doux, qu’un soir

    J’en fus embaumé, pour l’avoir

    Caressée une fois, rien qu’une.

     

    C’est l’esprit familier du lieu ;

    Il juge, il préside, il inspire

    Toutes choses dans son empire ;

    Peut être est-il fée, est-il dieu.

    Quand mes yeux vers ce chat que j’aime

    Tirés comme un aimant,

    Se retournent docilement

    Et que je regarde en moi-même,

     

    Je vois avec étonnement

    Le feu de ses prunelles pâles,

    Clairs fanaux, vivantes opales,

    Qui me contemplent fixement.

     

    Charles Baudelaire

    chat 2211

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