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Par renal le 10 Octobre 2016 à 09:54
Souvenirs ! Printemps !
Elle courait dans la rosée,
Sans bruit, de peur de m’éveiller ;
Moi, je n’ouvrais pas ma croisée,
De peur de la faire envoler.
Ses frères riaient... - Aube pure !
Tout chantait sous ses frais berceaux,
Ma famille avec la nature,
Mes enfants avec les oiseaux ! -
Je toussais, on devenait brave,
Elle montait à petits pas,
Et me disait d’un air très grave :
«J’ai laissé les enfants en bas. »
Qu’elle fût bien ou mal coiffée,
Que mon cœur fût triste ou joyeux,
Je l’admirais. C’était ma fée,
Et le doux astre de mes yeux !
Nous jouions toute la journée.
O jeux charmants ! chers entretiens !
Le soir, comme elle était l’aînée,
Elle me disait : «- Père, viens !
»Nous allons t’apporter ta chaise,
» Conte-nous une histoire, dis ! -»
Et je voyais rayonner d’aise
Tous ces regards du paradis.
Alors, prodiguant les carnages,
J’inventais un conte profond
Dont je trouvais les personnages
Parmi les ombres du plafond.
Toujours, ces quatre douces têtes
Riaient, comme à cet âge on rit,
De voir d’affreux géants très bêtes
Vaincus par des nains pleins d’esprit.
Victor Hugo contemplation
Photo Renal
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Par renal le 5 Octobre 2016 à 10:08
Mes adieux à l’enfance
Qu’avec douceur je me rappelle
Ces jours où, tournant dans nos mains
Nos mouchoirs, tordus avec zèle
Et durcis exprès pour nos reins,
Nous affrontions gaîment la grêle
Des fruits, pris aux pommiers voisins !
Ces jours où d’une antique échelle
Chargeant les appuis incertains,
Plus fiers que des soldats Romains,
Nous assiégions la citadelle
D’un ancien chenil à Lapins !
Victor Hugo (extrait)
Pyrénées Orientales, Aout 2016 Calvaire du Font Romieu
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Par renal le 26 Septembre 2016 à 09:23
J’ai cueilli cette fleur…
J’ai cueilli cette fleur pour toi sur la colline.
Dans l’âpre escarpement qui sur le flot s’incline,
Que l’aigle connaît seul et peut seul approcher,
Paisible, elle croissait aux fentes du rocher.
J’ai cueilli cette fleur pour toi, ma bien-aimée
Elle est pâle, et n’a pas de corolle embaumée,
Sa racine n’a pris sur la crête des monts
Que l’amène senteur des glauques goémons ;
Moi, j’ai dit : Pauvre fleur, du haut de cette cime,
Tu devais t’en aller dans cet immense abîme
Où l’algue et le nuage et les voiles s’en vont.
Va mourir sur un cœur, abîme plus profond.
Fane-toi sur ce sein en qui palpite un monde.
Le ciel, qui te créa pour t’effeuiller dans l’ombre,
Te fit pour l’Océan, je te donne à l’amour
Victor Hugo (extrait)
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Par renal le 9 Juin 2016 à 09:52
Attente
Monte, écureuil, monte au grand chêne,
Sur la branche des cieux prochaine,
Qui plie et tremble comme un jonc.
Cigogne, aux vieilles tours fidèle,
Oh ! vole et monte à tire-d'aile
De l'église à la citadelle,
Du haut clocher au grand donjon.
Vieux aigle, monte de ton aire
A la montagne centenaire
Que blanchit l'hiver éternel.
Et toi qu'en ta couche inquiète
Jamais l'aube ne vit muette,
Monte, monte, vive alouette,
Vive alouette, monte au ciel !
Et maintenant, du haut de l'arbre,
Des flèches de la tour de marbre,
Du grand mont, du ciel enflammé,
A l'horizon, parmi la brume,
Voyez-vous flotter une plume
Et courir un cheval qui fume,
Et revenir mon bien-aimé ?
Victor Hugo, Les Orientales
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Par renal le 23 Mars 2016 à 12:11
Après l’hiver
N’attendez pas de moi que je vais vous donner
Des raisons contre Dieu que je vois rayonner ;
La nuit meurt, l’hiver fuit ; maintenant la lumière,
Dans les champs, dans les bois, est partout la première.
Je suis par le printemps vaguement attendri.
Avril est un enfant, frêle, charmant, fleuri ;
Je sens devant l’enfance et devant le zéphyre
Je ne sais quel besoin de pleurer et de rire ;
Mai complète ma joie et s’ajoute à mes pleurs.
Jeanne, George, accourez, puisque voilà des fleurs.
Accourez, la forêt chante, l’azur se dore,
Vous n’avez pas le droit d’être absents de l’aurore.
Je suis un vieux songeur et j’ai besoin de vous,
Venez, je veux aimer, être juste, être doux,
Croire, remercier confusément les choses,
Vivre sans reprocher les épines aux roses,
Être enfin un bonhomme acceptant le bon Dieu.Ô printemps ! bois sacrés ! ciel profondément bleu !
On sent un souffle d’air vivant qui vous pénètre,
Et l’ouverture au loin d’une blanche fenêtre ;
On mêle sa pensée au clair-obscur des eaux ;
On a le doux bonheur d’être avec les oiseaux
Et de voir, sous l’abri des branches printanières,
Ces messieurs faire avec ces dames des manières.Victor Hugo
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Par renal le 11 Novembre 2015 à 09:37
Il faut que le poète
Il faut que le poète, épris d'ombre et d'azur,
Esprit doux et splendide, au rayonnement pur,
Qui marche devant tous, éclairant ceux qui doutent,
Chanteur mystérieux qu'en tressaillant écoutent
Les femmes, les songeurs, les sages, les amants,
Devienne formidable à de certains moments.
Parfois, lorsqu'on se met à rêver sur son livre,
Où tout berce, éblouit, calme, caresse, enivre,
Où l'âme à chaque pas trouve à faire son miel,
Où les coins les plus noirs ont des lueurs du ciel,
Au milieu de cette humble et haute poésie,
Dans cette paix sacrée où croit la fleur choisie,
Où l'on entend couler les sources et les pleurs,
Où les strophes, oiseaux peints de mille couleurs,
Volent chantant l'amour, l'espérance et la joie,
Il faut que par instants on frissonne, et qu'on voie
Tout à coup, sombre, grave et terrible au passant,
Un vers fauve sortir de l'ombre en rugissant !
Il faut que le poète aux semences fécondes
Soit comme ces forêts vertes, fraîches, profondes,
Pleines de chants, amour du vent et du rayon,
Charmantes, où soudain l'on rencontre un lion.
Paris, mai 1842.
Victor Hugo.
http://www.poesie-francaise.fr
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Par renal le 5 Novembre 2015 à 08:27
La nature est pleine d’amour
La nature est pleine d'amour,
Jeanne, autour de nos humbles joies ;
Et les fleurs semblent tour à tour
Se dresser pour que tu les voies.
Vive Angélique ! à bas Orgon !
L'hiver, qu'insultent nos huées,
Recule, et son profil bougon
Va s'effaçant dans les nuées.
La sérénité de nos coeurs,
Où chantent les bonheurs sans nombre,
Complète, en ces doux mois vainqueurs,
L'évanouissement de l'ombre.
Juin couvre de fleurs les sommets,
Et dit partout les mêmes choses ;
Mais est-ce qu'on se plaint jamais
De la prolixité des roses ?
L'hirondelle, sur ton front pur,
Vient si près de tes yeux fidèles
Qu'on pourrait compter dans l'azur
Toutes les plumes de ses ailes.
Ta grâce est un rayon charmant ;
Ta jeunesse, enfantine encore,
Éclaire le bleu firmament,
Et renvoie au ciel de l'aurore.
De sa ressemblance avec toi
Le lys pur sourit dans sa gloire ;
Ton âme est une urne de foi
Où la colombe voudrait boire.
Victor Hugo.
http://www.poesie-francaise.fr
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Par renal le 31 Octobre 2015 à 10:03
Je ne demande pas autre chose aux forêts
Je ne demande pas autre chose aux forêts
Que de faire silence autour des antres frais
Et de ne pas troubler la chanson des fauvettes.
Je veux entendre aller et venir les navettes
De Pan, noir tisserand que nous entrevoyons
Et qui file, en tordant l'eau, le vent, les rayons,
Ce grand réseau, la vie, immense et sombre toile
Où brille et tremble en bas la fleur, en haut l'étoile.
Victor Hugo.
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Par renal le 28 Septembre 2015 à 09:10
Mes poèmes
Mes poèmes ! Soyez des fleuves !
Allez en vous élargissant !
Désaltérez dans les épreuves
Les cœurs saignants, les âmes veuves,
Celui qui monte ou qui descend.
Que l'aigle plonge, loin des fanges,
Son bec de lumière en vos eaux !
Et dans vos murmures étranges
Mêlez l'hymne de tous les anges
Aux chansons de tous les oiseaux !
Victor Hugo
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Par renal le 21 Septembre 2015 à 08:31
La pauvre fleur
La pauvre fleur disait au papillon céleste
— Ne fuis pas!
Vois comme nos destins sont différents. Je reste,
Tu t'en vas !
Pourtant nous nous aimons, nous vivons sans les hommes
Et loin d'eux,
Et nous nous ressemblons, et l'on dit que nous sommes
Fleurs tous deux !
Mais, hélas ! l'air t'emporte et la terre m'enchaîne.
Sort cruel !
Je voudrais embaumer ton vol de mon haleine
Dans le ciel !
Mais non, tu vas trop loin ! — Parmi des fleurs sans nombre
Vous fuyez,
Et moi je reste seule à voir tourner mon ombre
À mes pieds !
Tu fuis, puis tu reviens, puis tu t'en vas encore
Luire ailleurs.
Aussi me trouves-tu toujours à chaque aurore
Toute en pleurs !
Oh ! pour que notre amour coule des jours fidèles,
Ô mon roi,
Prends comme moi racine, ou donne-moi des ailes
Comme à toi !Victor Hugo
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