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Par renal le 19 Avril 2012 à 09:02
Tout était d’accord
Tout était d'accord dans les plaines,
Tout était d'accord dans les bois
Avec la douceur des haleines,
Avec le mystère des voix.
Tout aimait ; tout faisait la paire,
L'arbre à la fleur disait : Nini;
Le mouton disait : Notre Père,
Que votre sainfoin soit béni !
Les abeilles dans l'anémone,
Mendiaient, essaim diligent;
Le printemps leur faisait l'aumône
Dans une corbeille d'argent.
Et l'on mariait dans l'église,
Sous le myrte et le haricot,
Un œillet nommé Cydalise .
Avec un chou nommé Jacquot. [...]
Cachés par une primevère,
Une caille, un merle siffleur,
Buvaient tous deux au même verre
Dans une belladone en fleur.
Pensif, j'observais en silence,
Car un cœur n'a jamais aimé
Sans remarquer la ressemblance
De l'amour et du mois de mai.
(Victor Hugo)
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Par renal le 6 Avril 2012 à 07:41
Mauvaises langues
Un pigeon aime une pigeonne !
Grand scandale dans le hallier
Que tous les ans mai badigeonne.
Une ramière aime un ramier! [...]
L'ara blanc, la mésange bleue,
Jettent des car, des si, des mais,
Où les gestes des hoche queue
Semblent semer des guillemets.
- J'en sais long sur la paresseuse !
Dit un corbeau, juge à mortier.
- Moi, je connais sa blanchisseuse.
- Et moi, je connais son portier. [...]
Le geai dit : Leurs baisers blasphèment !
Le pinson chante : Ça ira.
La linotte fredonne : Ils s'aiment.
La pie ajoute : Et caetera.
Victor Hugo
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Par renal le 2 Avril 2012 à 19:00
Enfants, oiseaux et Fleurs
Je suis des bois l'hôte fidèle,
Le jardinier des sauvageons.
Quand l'automne vient, l'hirondelle
Me dit tout bas : Déménageons.
Après frimaire, après nivôse,
Je vais voir si les bourgeons frais
N'ont pas besoin de quelque chose
Et si rien ne manque aux forêts.
Je dis aux ronces : Croissez, vierges !
Je dis : Embaume ! Au serpolet ;
Je dis aux fleurs bordant les berges :
Faites avec soin votre ourlet.
J'aime la broussaille mouvante,
Le lierre, le lichen vermeil,
Toutes les coiffures qu'inventé
Pour les ruines le soleil.
Quand mai fleuri met des panaches
Aux sombres donjons mécontents,
Je crie à ces vieilles ganaches :
Laissez donc faire le printemps !
Victor Hugo
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Par renal le 20 Mars 2012 à 08:41
Printemps
Voici donc les longs jours, lumière, amour, délire !
Voici le printemps ! mars, avril au doux sourire,
Mai fleuri, juin brûlant, tous les beaux mois amis !
Les peupliers, au bord des fleuves endormis,
Se courbent mollement comme de grandes palmes ;
L'oiseau palpite au fond des bois tièdes et calmes ;
Il semble que tout rit, et que les arbres verts
Sont joyeux d'être ensemble et se disent des vers.
Le jour naît couronné d'une aube fraîche et tendre ;
Le soir est plein d'amour ; la nuit, on croit entendre,
A travers l'ombre immense et sous le ciel béni,
Quelque chose d'heureux chanterdans l'infini.
Victor-Hugo.
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Par renal le 26 Octobre 2011 à 08:29
LA MORT D’UN CHIEN
Un groupe tout à l'heure était là sur la grève,
Regardant quelque chose à terre. — Un chien qui crève !
M’ont crié des enfants ; voilà tout ce que c'est. —
Et j'ai vu sous leurs pieds un vieux chien qui gisait.
L'Océan lui jetait l'écume de ses lames.
— Voilà trois jours qu'il est ainsi, disaient des femmes,
On a beau lui parler, il n'ouvre pas les yeux.
— Son maître est un marin absent, disait un vieux.
Un pilote, passant la tête à sa fenêtre,
A repris : — Ce chien meurt de ne plus voir son maître.
Justement le bateau vient d'entrer dans le port ;
Le maître va venir, mais le chien sera mort.
Je me suis arrêté près de la triste bête,
Qui, sourde, ne bougeant ni le corps, ni la tête,
Les yeux fermés, semblait morte sur le pavé.
Comme le soir tombait, le maître est arrivé,
Vieux lui-même ; et, hâtant son pas que l'âge casse,
A murmuré le nom de son chien à voix basse.
Alors, rouvrant ses yeux pleins d'ombre, exténué,
Le chien a regardé son maître, a remué
Une dernière fois sa pauvre vieille queue,
Puis est mort.
C'était l'heure où, sous la voûte bleue,
Comme un flambeau qui sort d'un gouffre, Vénus luit.
Et j'ai dit : D'où vient l'astre ? Où va le chien ? Ô nuit !
VICTOR HUGO
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Par renal le 18 Novembre 2010 à 12:48
Soleil couchant
J'aime les soirs sereins et beaux, j'aime les soirs, Soit qu'ils dorent le front des antiques manoirs
Ensevelis dans les feuillages ;
Soit que la brume au loin s'allonge en bancs de feu ;
Soit que mille rayons brisent dans un ciel bleu
À des archipels de nuages.
Oh ! Regardez le ciel ! Cent nuages mouvants, Amoncelés là-haut sous le souffle des vents,
Groupent leurs formes inconnues ;
Sous leurs flots par moments flamboie un pâle éclair.
Comme si tout à coup quelque géant de l'air
Tirait son glaive dans les nues.
Le soleil, à travers leurs ombres, brille encor ; Tantôt fait, à l'égal des larges dômes d'or,
Luire le toit d'une chaumière ;
Ou dispute aux brouillards les vagues horizons ;
Ou découpe, en tombant sur les sombres gazons,
Comme de grands lacs de lumière.
Puis voilà qu'on croit voir, dans le ciel balayé, Pendre un grand crocodile au dos large et rayé,
Aux trois rangs de dents acérées ;
Sous son ventre plombé glisse un rayon du soir ;
Cent nuages ardents luisent sous son flanc noir
Comme des écailles dorées.
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Par renal le 16 Février 2010 à 13:01
OÙ TROUVE-T-ON L'AURORE ?
Puisque là-bas s'entrouvre une porte vermeille,
Puisque l'aube blanchit le bord de l'horizon,
Pareille au serviteur qui le premier s'éveille
Et, sa lampe à la main, marche dans la maison,
Puisqu'un blême rayon argenté la fontaine,
Puisqu'à travers les bois l'immense firmament
Jette une lueur pâle et calme que la plaine
Regarde vaguement.
Puisque le point du jour sur les monts vient d'éclore,
Je m'en vais dans les champs tristes, vivants et doux
Je voudrais bien savoir où l'on trouve une aurore
Pour cette sombre nuit que nous avons en nous !
Que fait l'homme ? La vie est-elle une aventure ?
Que verra-t-on après et de l'autre côté ?
Tout frissonne. Est-ce à moi que tu parles, nature,
Dans cette obscurité ?
Victor Hugo
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Par renal le 20 Décembre 2008 à 21:51
Le Pont
J'avais devant les yeux les ténèbres. L'abîme,
Qui n'a pas de rivage et qui n'a pas de cime,
Etait là, morne, immense ; et rien n'y remuait.
Je me sentais perdu dans l'infini muet.
Au fond, à travers l'ombre, impénétrable voile,
On apercevait Dieu comme une sombre étoile.
Je m'écriais : - Mon âme, ô mon âme ! il faudrait,
Pour traverser ce gouffre où nul bord n'apparaît,
Et pour qu'en cette nuit jusqu'à ton Dieu tu marches,
Bâtir un pont géant sur des milliers d'arches.
Qui le pourra jamais ? Personne ! O deuil ! Effroi !
Pleure ! - Un fantôme blanc se dressa devant moi
Pendant que je jetai sur l'ombre un œil d'alarme,
Et ce fantôme avait la forme d'une larme ;
C'était un front de vierge avec des mains d'enfant ;
Il ressemblait au lys que la blancheur défend ;
Ses mains en se joignant faisaient de la lumière.
Il me montra l'abîme où va toute poussière,
Si profond que jamais un écho n'y répond,
Et me dit : - Si tu veux, je bâtirai le pont. -
Vers ce pâle inconnu je levai ma paupière.
- Quel est ton nom ? Lui dis-je. Il me dit : - La prière.
Victor HUGO
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Par renal le 28 Juillet 2008 à 17:17
Le soleil s'est couché ce soir dans les nuées
Le soleil s'est couché ce soir dans les nuées.
Demain viendra l'orage, et le soir, et la nuit ;
Puis l'aube, et ses clartés de vapeurs obstruées ;
Puis les nuits, puis les jours, pas du temps qui s'enfuit !
Tous ces jours passeront; ils passeront en foule
Sur la face des mers, sur la face des monts,
Sur les fleuves d'argent, sur les forêts où roule
Comme un hymne confus des morts que nous aimons.
Et la face des eaux, et le front des montagnes,
Ridés et non vieillis, et les bois toujours verts
S'iront rajeunissant ; le fleuve des campagnes
Prendra sans cesse aux monts le flot qu'il donne aux mers.
Mais moi, sous chaque jour courbant plus bas ma tête,
Je passe, et, refroidi sous ce soleil joyeux,
Je m'en irai bientôt, au milieu de la fête,
Sans que rien manque au monde, immense et radieux !
Victor HUGO
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Par renal le 26 Janvier 2008 à 08:47
AIMONS-NOUS TOUJOURS ! AIMONS-NOUS ENCORE !
Aimons toujours ! Aimons encore !
Quand l'amour s'en va, l'espoir fuit.
L'amour, c'est le cri de l'aurore,
L'amour c'est l'hymne de la nuit.
Ce que le flot dit aux rivages,
Ce que le vent dit aux vieux monts,
Ce que l'astre dit aux nuages,
C'est le mot ineffable : Aimons !
L'amour fait songer, vivre et croire.
Il a pour réchauffer le cœur,
Un rayon de plus que la gloire,
Et ce rayon c'est le bonheur !
Aime ! qu'on les loue ou les blâme,
Toujours les grand cœurs aimeront :
Joins cette jeunesse de l'âme
A la jeunesse de ton front !
Aime, afin de charmer tes heures !
Afin qu'on voie en tes beaux yeux
Des voluptés intérieures
Le sourire mystérieux !
Aimons-nous toujours davantage !
Unissons-nous mieux chaque jour.
Les arbres croissent en feuillage ;
Que notre âme croisse en amour !
Soyons le miroir et l'image !
Soyons la fleur et le parfum !
Les amants, qui, seuls sous l'ombrage,
Se sentent deux et ne sont qu'un !
Les poètes cherchent les belles.
La femme, ange aux chastes faveurs,
Aime à rafraîchir sous ses ailes
Ces grand fronts brûlants et rêveurs.
Venez à nous, beautés touchantes !
Viens à moi, toi, mon bien, ma loi !
Ange ! viens à moi quand tu chantes,
Et, quand tu pleures, viens à moi !
Nous seuls comprenons vos extases.
Car notre esprit n'est point moqueur ;
Car les poètes sont les vases
Où les femmes versent leur cœurs.
Moi qui ne cherche dans ce monde
Que la seule réalité,
Moi qui laisse fuir comme l'onde
Tout ce qui n'est que vanité,
Je préfère aux biens dont s'enivre
L'orgueil du soldat ou du roi,
L'ombre que tu fais sur mon livre
Quand ton front se penche sur moi.
Toute ambition allumée
Dans notre esprit, brasier subtil,
Tombe en cendre ou vole en fumée,
Et l'on se dit : " Qu'en reste-t-il ? "
Tout plaisir, fleur à peine éclose
Dans notre avril sombre et terni,
S'effeuille et meurt, lis, myrte ou rose,
Et l'on se dit : " C'est donc fini ! "
L'amour seul reste. O noble femme
Si tu veux dans ce vil séjour,
Garder ta foi, garder ton âme,
Garder ton Dieu, garde l'amour !
Conserve en ton cœur, sans rien craindre,
Dusses-tu pleurer et souffrir,
La flamme qui ne peut s'éteindre
Et la fleur qui ne peut mourir !
Victor HUGO
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