• Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

    De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

    Les émotions s’inscrivent dans notre patrimoine génétique et dans nos câblages cérébraux, et sont ensuite renforcées par notre éducation et notre milieu culturel. Toutes nous sont utiles : la colère, la tristesse, la peur, l’anxiété, la honte ont des fonctions bien précises. Elles nous rendent service, à condition qu’elles n’atteignent pas des intensités trop fortes, qu’elles ne durent pas trop longtemps et que nous ne perdions pas de vue  leur finalité. C’est-à-dire, à condition que nous soyons conscients de leur existence, de leurs mécanismes et de leur influence sur nous : c’est ce qu’on appelle l’intelligence émotionnelle. Mais sans les émotions positives, on ne tiendrait pas sur la durée ; ce sont elles qui rouvrent ensuite notre regard et notre capacité à nous lier les uns aux autres, à sont notre carburant pour avancer.  Christophe

     

    Abécédaire de la Sagesse  Les émotions

    Auray Morbihan aout 2023


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     

    De Christophe André,  Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

    L’émerveillement invite en notre paysage intérieur des états mentaux sereins, vastes et ouverts qui engendrent un sentiment d’adéquation avec le monde. Il nous fait sortir de nous-mêmes, immensifie l’esprit et dilate le cœur. Il nous emplit de la vaste et émouvante interdépendance des êtres et de la nature. En tout cela, l’émerveillement nous guide vers la sagesse.

    Les sources d’émerveillement sont multiples : le regard d’un enfant qui vient de naître, un acte d’une grande bonté, les moments où on laisse son esprit reposer au sein de la paix intérieure. Emerveillons-nous de la nature sauvage ou d’un visage qui reflète les profondeurs de la sagesse et de la compassion. Émerveillons- nous à la lecture d’un poème, en écoutant un prélude de Bach ou un enseignement dont les lumières ins­pirent l’esprit. Se fondre dans l’immensité du ciel, se perdre dans le dédale d’une écorce, disparaître dans l’intimité d’une fleur, savourer l’appel mélodieux d’une grive, la légèreté d’un flocon de neige qui se pose au creux de la main, la fraîcheur de l’instant présent sans s’égarer dans les mille et un ailleurs de la distraction.

    L’émerveillement s’apparente à l’expérience du «flux» (flow), cette immersion parfaite en ce que l’on fait ou contemple décrite par le psychologue Mihâly ( 'sikszentmihâlyi.

    Incompatible avec l’animosité, l’avidité et l’orgueil, l’émerveillement permet au meilleur de nous-mêmes de remonter à la surface ; et, puisqu’il se conjugue parfaitement avec la bienveillance, la générosité et l’admiration, il est dépourvu de vanité. En cela, il nous élève.

    l’individu, celles de l’environnement en particulier. L’émerveillement, nous disent les chercheurs, réduit l’individualisme et l’apitoiement sur soi.

    Celles et ceux qui s’émerveillent auront davantage tendance à se décrire comme «un habitant de cette planète» que comme un «individu». L’émerveillement engendre le respect envers la nature sauvage, le respect mène au désir de protéger notre environnement et ce désir mène à l’action qui elle-même peut nous mener vers une harmonie durable entre l’homme et l’environnement dont il fait partie par le jeu de l’interdépendance de toute chose. Matthieu


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

     

    L’ego

    L’ego ne fait pas partie du vocabulaire courant de la psychologie, on parle plutôt d’«estime de soi», qui définit l’ensemble des façons de se regarder, de se juger, de se considérer, de se traiter. Pour ma part, je décrirais volontiers l’ego comme l’ensemble des attachements à soi, à sa propre image, et j’aimerais parler de ses pathologies et de toutes leurs conséquences. On sait, par de nombreuses études, que l’estime de soi est profondément influencée par toutes les relations sociales. Au fond, beaucoup de chercheurs considèrent que la valeur que l’on s’accorde est très fortement, pour ne pas dire quasi exclusivement, constituée du sentiment qu’on a d’être estimé par les autres. Autrement dit, c’est le regard des autres qui conditionne la qualité du regard qu’on porte sur soi-même et qui reflète en réalité la manière dont on se voit dans les yeux des autres.

     

    Je conclurai par deux points : l’ego est un mal nécessaire, comme un véhicule de location. Nous avons besoin de lui pour traverser la vie, tout comme nous avons besoin d’un moyen de locomotion pour nous déplacer d’un point à un autre - sauf si l’on est un ermite ou un contemplatif qui ne bouge pas de son monastère, et trouve peut-être que se débarrasser complètement de son ego est plus simple. Sur les routes de la vie, il y a des véhicules plus polluants que d’autres : de gros quatre-quatre qui consomment beaucoup d’essence, qui veulent qu’on les regarde et qu’on les laisse passer, et à l’autre extrême, des petits vélos qui ne polluent pas et ne font pas de bruit. Il me semble qu’on ne peut pas se débarrasser de l’ego, le balancer par la fenêtre, mais qu’on peut juste s’assurer qu’il ne soit pas trop polluant pour les autres, pas trop coûteux pour nous (en énergie, en soins, en entretien...)- Second point: on ne peut pas espérer se débarrasser de l’ego en le méprisant. Chez les patients qui souffrent de manque d’estime de soi, la solution n’est pas de continuer à se mépriser: souvent, ils sont à la fois obsédés par eux- mêmes et irrités contre eux-mêmes. On en revient à cette différence capitale entre détachement et non- attachement : l’idée n’est pas de se détacher de l’ego de façon obsessionnelle, mais nos efforts doivent nous porter vers le non-attachement à l’ego. Christophe

     

     


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

     

    Écoute

    On pourrait définir l’écoute comme une présence à autrui pendant laquelle toute l’attention, toute la conscience, est tournée vers ce que dit la personne que l’on a en face de soi. C’est une attitude complexe, où l’on donne et où l’on reçoit, une démarche d’humilité, où l’on fait passer autrui avant soi-même.

    Dans l’écoute, on trouve trois mécanismes fondamentaux: le respect de la parole d’autrui, le lâcher- prise et la capacité à se laisser toucher.

    Respecter la parole, c’est d’abord ne pas juger ce que nous dit  l’autre pendant que nous l’écoutons. Et c’est très difficile ! Automatiquement, nous avons tendance à porter un jugement : nous apprécions, n’apprécions pas, nous sommes d’accord, pas d’accord, nous trouvons que c’est juste ou faux, brillant ou idiot. Difficile d’empêcher ce jugement de parvenir à notre esprit, mais chaque fois qu’on le remarque, on peut le noter et s’en détacher, pour revenir de son mieux à une véritable écoute. Le lâcher-prise, ce sont mes patients qui me l’ont appris. Les grands timides et les grands anxieux ont tellement peur de ne pas être à la hauteur de leur interlocuteur qu’ils écoutent mal parce qu’ils préparent ce qu’ils vont pouvoir répondre. Dans la véritable écoute, on ne doit pas préparer sa réponse, mais seulement écouter, en lâchant prise. On a parfois le sentiment que c’est une position un peu «casse-gueule», mais notre réponse sera d’autant plus profonde et adaptée qu’on aura totalement abandonné l’idée de la préparer. Ce lâcher-prise est aussi la condition d’une écoute sincère et véritable où l’on est prêt à se laisser toucher, émouvoir, sans jugement, sans contrôle, sans désir de maîtriser, sans aucune intention finalement. Christophe

     

    TROIS CONSEILS DE CHRISTOPHE POUR MIEUX ÉCOUTER

    On progresse beaucoup plus en écoutant qu’en parlant. La parole nous transforme parce qu’elle nous force à préciser nos idées, mais l’écoute est encore plus puissante, car elle nous ouvre à d’autres univers que le nôtre.

    Toujours se rappeler qu’écouter, c’est donner. Pas seulement des réponses, mais de la présence.

    Pour bien écouter, Il faut se désemplir en partie : de ses peurs (peur de ne pas savoir quoi dire, de ne pas avoir de réponses à donner), de ses certitudes, de ses lassitudes.

     

    Abécédaire de la Sagesse L'écoute


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

     

    Échec

    Comme tout le monde, je préfère réussir qu’échouer : c’est plus agréable, plus satisfaisant et plus valorisant. Mais en y réfléchissant, je pense que mes échecs m’ont davantage conduit à réfléchir, à me remettre en question, et finalement, à progresser. Et au total, j’aurais eu besoin des deux : l’énergie et la confiance, offertes par la joie des succès ; et la prudence et le travail, imposés par l’inconfort des échecs. Christophe

    Abécédaire de la Sagesse (Échec)


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

    Dépression

    La tristesse peut se combattre, la dépression doit se soigner. Elle est un effondrement de nos capacités à vivre : à aimer l’existence et à surmonter ses adversités. Sous l’emprise de la dépression, nous ne voyons plus la vie que comme une suite de difficultés, qui ne cessent que par la mort. D’où l’envie que « ça s’arrête » : que la dépression s’arrête ou que la vie s’arrête. Il ne faut surtout pas juger les personnes déprimées: elles ne sont ni faibles, ni égoïstes, ni plaintives, elles sont malades, d’une maladie invisible et destructrice. Il faut les aider ; et parfois la seule aide possible pour les proches consistera à les pousser à se soigner, même si elles ne le veulent pas (persuadées que ça ne sert à rien). La dépression se soigne, et de mieux en mieux, par médicaments, psychothérapie et bien d’autres techniques. Puis, quand on est guéri, on s’occupe de prévenir son retour, car elle a volontiers tendance à se réinviter. Pour l’empêcher de se réinstaller, travailler à son bonheur est une bonne idée : faire naître chaque jour, au-dessus de nos têtes, des anticyclones d’émotions positives, qui, comme dans la vraie météo, écarteront les passages dépressionnaires loin de nous. Christophe

     


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

     

    La culpabilité et les regrets ont une fonction psychologique : ne pas banaliser nos erreurs, nous pousser à y réfléchir et à les fixer à notre mémoire pour que nous soyons motivés à ne pas les reproduire. Le sentiment de culpabilité est donc utile. Ce sont ses excès et ses dérapages qui sont un problème. C’est même, d’une certaine façon, un bon signe : les personnes qui ressentent de la culpabilité sont souvent des personnes empathiques, attentives à autrui, et soucieuses d’agir de manière juste. Christophe

     

    Le sage  ne te demande pas ce qu’il y a de plus que toi, mais cherche plutôt ce qu’il a en moins. Christophe.

     

    Abécédaire de la Sagesse (19)


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

    La générosité est tout sauf mièvre, qu’au contraire elle procède d’un sublime courage, qu’elle est de la dynamite bien capable de faire péter les égoïsmes la brutalité, la soif de vengeances en douceur.

    Alexandre.

     

    L’apprentissage de la sagesse n’est pas toujours confortable ni solitaire. L’image du sage, seul dans son coin, qui médite sur ce qu’il convient de faire de sa vie, est souvent un cliché. Ce qui nous rend sages, c’est aussi l’accueil de ce qui nous dérange, et de ce qui, en nous, dérange les autres. L’accueil curieux et calme des critiques est un exercice de sagesse appliquée. Si elles sont fondées, elles nous apprennent ce qu’il faut changer chez nous. Si elles ne le sont pas, elles nous apprennent comment les autres nous voient, ou ce qu’ils portent en eux. Christophe

     


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

    L’empathie comporte deux aspects, l’un affectif, l’autre cognitif. L’empathie affective est la capacité d’entrer en résonance émotionnelle avec les sentiments de quelqu’un d’autre, de prendre ainsi conscience de sa situation. Si l’autre est joyeux, je ressens moi-même une certaine joie. S’il souffre, je souffre de sa souffrance. Cette empathie affective nous alerte donc sur la nature et l’intensité des sentiments d’autrui, la souffrance surtout.

    L’empathie cognitive consiste à se mettre à la place de l’autre – qu’est ce que je ressentirai si je souffrais de famine ou si j’étais torturé en prison ? ou à imaginer ce qu’il ressent, sans pour autant ressentir la même chose. Je peux, par exemple, être assis dans l’avion à côté de quelqu’un de terrifié par les vols en avion et l’aider en imaginant sa détresse, sans pour autant éprouver la même peur. Sans empathie, il est difficile de connaître la situation de l’autre et d’être concerné par son sort. L’empathie ne mène pas nécessairement à l’altruisme, ce désir de faire le bien de  l’autre, et à la compassion ce désir de remédier à la souffrance.

    L’empathie est l’effet que le sort des autres à sur soi tandis que l’amour altruisme est la compassion sont tourner vers les autres.

    La compassion est la forme que prend l’altruisme quand il est confronté à la souffrance d’autrui

    Quand la haine a déjà enflammé l’esprit de quelqu’un, la compassion consiste à adopter face à lui une attitude du médecin envers un fou furieux. Il faut d abord l’empêcher de nuire,   il faut aussi envisager tous les moyens possibles pour résoudre le problème sans tomber soi-même dans la violence et la haine.  Si la haine répond à la haine, le problème  n’aura jamais de fin. Quand on prend sur soi la souffrance des autres, puis quand on la transforme et qu’on la dissout mentalement par le pouvoir de la compassion, non seulement ça n’accroît pas nos tourments, mais ça les rend plus légers.

    Matthieu

    Abécédaire de la Sagesse l'Empathie et la Compassion..

    Martinique mars 2023

     


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

     

    Les émotions s’inscrivent dans notre patrimoine génétique et dans nos câblages cérébraux, et son ensuite renforcées par notre éducation et notre milieu culturel. Toutes nous sont utiles : la colère, la tristesse, la peur, l’anxiété, la honte ont des fonctions bien précises. Elles nous rendent service, à condition qu’elles n’atteignent pas des intensités trop fortes, qu’elles ne durent pas trop longtemps et que nous ne perdions pas de vue leur finalité. C'est-à-dire, à condition que nous soyons conscients de leur existence, de leurs mécanismes et de leur influences sur nous : c’est ce qu’on appelle l’intelligence émotionnelle.

    Toutes nos émotions sont des signaux à propos de nos besoins. Le émotions positives nous disent que nos besoins sont satisfaits ou en voie de satisfaction. Les émotions négatives, qu’ils ne sont pas satisfait. Écoutons-les donc, et réfléchissons pour agir au mieux pour l’équilibre de nos besoins fondamentaux.

     

    Abécédaire de la Sagesse (17)


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    Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

     

    L’émerveillement invite en notre paysage intérieur des états mentaux sereins, vastes et ouverts qui engendrent un sentiment d’adéquation avec le monde. Il nous fait sortir de nous-mêmes, immensifie l’esprit et dilate le cœur. Il nous emplit de la vaste et émouvante interdépendance des êtres et de la nature. En tout cela, l’émerveillement nous guide vers la sagesse.

    Incompatible avec l’animosité, l’avidité et l’orgueil, l’émerveillement permet au meilleur de nous-mêmes de remonter à la surface ; et, puisqu’il de conjugue parfaitement avec la bienveillance, la générosité et l’admiration, il est dépourvu de vanité. En cela il nous élève.

    L’émerveillement engendre le respect envers la nature sauvage, le respect mène au désir de protéger notre environnement et ce désir mène à l’action qui elle-même peut nous mener vers une harmonie durable entre l’homme et l’environnement dont il fait partie par le jeu de l’interdépendance de toute chose.

    Matthieu

    Coucher de Soleil à Schoelcher Martinique février 2023


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

     

    L’ego ne fait pas partie du vocabulaire courant de la psychologie, on parle plutôt d’«estime de soi», qui définit l’ensemble des façons de se regarder, de se juger, de se considérer, de se traiter. Pour ma part, je décrirais volontiers l’ego comme l’ensemble des attachements à soi, à sa propre image.

    Deux points : l’ego est un mal nécessaire, comme un véhicule de location. Nous avons besoin de lui pour traverser la vie, tout comme nous avons besoin d’un moyen de locomotion pour nous déplacer d’un point à un autre - sauf si l’on est un ermite ou un contemplatif qui ne bouge pas de son monastère, et trouve peut-être que se débarrasser complètement de son ego est plus simple. Sur les routes de la vie, il y a des véhicules plus polluants que d’autres : de gros quatre-quatre qui consomment beaucoup d’essence, qui veulent qu’on les regarde et qu’on les laisse passer, et à l’autre extrême, des petits vélos qui ne polluent pas et ne font pas de bruit. Il me semble qu’on ne peut pas se débarrasser de l’ego, le balancer par la fenêtre, mais qu’on peut juste s’assurer qu’il ne soit pas trop polluant pour les autres, pas trop coûteux pour nous (en énergie, en soins, en entretien...). Second point: on ne peut pas espérer se débarrasser de l’ego en le méprisant. Chez les patients qui souffrent de manque d’estime de soi, la solution n’est pas de continuer à se mépriser: souvent, ils sont à la fois obsédés par eux- mêmes et irrités contre eux-mêmes. On en revient à cette différence capitale entre détachement et non- attachement: l’idée n’est pas de se détacher de l’ego de façon obsessionnelle, mais nos efforts doivent nous porter vers le non-attachement à l’ego. Comme dans la célèbre phrase de Paul Valéry: «Je me suis détesté,

    je me suis adoré - puis nous avons vieilli ensemble. » Christophe

     

    Abécédaire de la Sagesse (16)

    Martinique février 2023


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

    Écouter

    On pourrait définir l’écoute comme une présence à autrui pendant laquelle toute l’attention, toute la conscience, est tournée vers ce que dit la personne que l’on a en face de soi. C’est une attitude complexe, où l’on donne et où l’on reçoit, une démarche d’humilité, où l’on fait passer autrui avant soi-même. Dans l’écoute, on trouve trois mécanismes fondamentaux : le respect de la parole d’autrui, le lâcher- prise et la capacité à se laisser toucher.

     

    Respecter la parole, c’est d’abord ne pas juger ce que nous dit l’autre pendant que nous l’écoutons. Et c’est très difficile ! Automatiquement, nous avons tendance à porter un jugement : nous apprécions, n’apprécions pas, nous sommes d’accord, pas d’accord, nous trouvons que c’est juste ou faux, brillant ou idiot. Difficile d’empêcher ce jugement de parvenir à notre lâcher-prise, ce sont mes patients qui me l’ont appris. Les grands timides et les grands anxieux ont tellement peur de ne pas être à la hauteur de leur interlocuteur qu’ils écoutent mal parce qu’ils préparent ce qu’ils vont pouvoir répondre. Dans la véritable écoute, on ne doit pas préparer sa réponse, mais seulement écouter, en lâchant prise. On a parfois le sentiment que c’est une position un peu « casse-gueule », mais notre réponse sera d’autant plus profonde et adaptée qu’on aura totalement abandonné l’idée de la préparer. Ce lâcher-prise est aussi la condition d’une écoute sincère et véritable où l’on est prêt à se laisser toucher, émouvoir, sans jugement, sans contrôle, sans désir de maîtriser, sans aucune intention finalement.

    On progresse beaucoup plus en écoutant qu'en parlant. La parole nous transforme parce qu'elle nous force à préciser nos idées, mais l’écoute est encore plus puissante, car elle nous ouvre à d’autres univers que le nôtre.

     

    Toujours se rappeler qu'écouter, c’est donner. Pas seulement des réponses, mais de la présence.

    Pour bien écouter, Il faut se désemplir en partie : de ses peurs (peur de ne pas savoir quoi dire, de ne pas avoir de réponses à donner), de ses certitudes, de ses lassitudes.

    Christophe

     

    Abécédaire de la Sagesse (15)

     


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

    Il peut y avoir des frottements et des discordes dans les liens sociaux, quels qu’ils soient. Le marqueur d’une relation humaine fonctionnelle est la capacité de réparation et non la permanence de l’accord : quand celle-ci existe, tant mieux, après tout ! Mais on doit pouvoir discuter, voire être en désaccord. Christophe

     

    Comme tout le monde, je préfère réussir qu’échouer : c’est plus agréable, plus satisfaisant et plus valorisant. Mais en y réfléchissant, je pense que mes échecs m’ont davantage conduit à réfléchir, à me remettre en question, et finalement, à progresser. Et au total, j’aurais eu besoin des deux : l’énergie et la confiance, offertes par la joie des succès ; et la prudence et le travail, imposés par l’inconfort des échecs. Christophe

     

     

     


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  • Extrait du livre « Abécédaire de la Sagesse

     De Christophe André, Alexandre Jollien et Matthieu Ricard

     

    Un ami indien m'a raconté l'histoire suivante: 

    Un pêcheur est assis à l'ombre d'un arbre, au bord d'un lac. Il joue avec ses enfants. Survient un homme de la ville, qui contemple la scène et entame la conversation.

    Bonjour, que faites-vous dans la vie, mon bon monsieur ?

    Je suis pêcheur. Mon bateau est là, sur la berge. j'ai pêché toute la matinée.

    Pourquoi ne pêchez-vous pas l'après-midi?

    J'ai de quoi nourrir ma famille pour les deux jours à venir.

    Mais si vous pêchiez toute la journée, vous pourriez aussi vendre votre poisson.

    Et alors?

    Alors, vous auriez de quoi payer un associé, vous pêcheriez plus de poissons et augmenteriez vos revenus.

    Qu’est-ce que j'en ferais?

    Eh bien, vous pourriez acheter un deuxième bateau et prospérer davantage!

    Et après tout ça?

    Vous pourriez arrêter de travailler et passer du bon temps à vous détendre et à jouer avec vos enfants.

    Mais c'est exactement ce que je suis en train de faire !

     

    Le discernement est l'une des valeurs clés qui, alliées à la sagesse et à l'entraînement de l'esprit, nous permettent d'identifier les causes de la souffrance et de nous affranchir de leur servitude. Beaucoup souhaitent être heureux, et estiment que pour cela il faut être riche, puissant, célèbre. Ils apprennent un jour que certains de ceux qui avaient réuni toutes ces conditions sont en réalité déprimés, toxicomanes ou se sont suicidés. Ils se disent alors: «Bizarre, moi, si j'avais tout cela, je serais heureux bien sûr.» Mais s'ils s'étaient donné la peine de réfléchir, ils se seraient rendu compte que cette fausse route ne mène à aucune satisfaction profonde. Ils ont donc fait preuve d'un manque de discernement et ont tourné le dos à des valeurs comme l'amitié, la sérénité, la paix intérieure, et l'équilibre émotionnel, qui pouvaient engendrer un épanouissement durable. (Matthieu)

     

    Abécédaire de la Sagesse (13)

     


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    Extraits du livre « Veilleur où en est la nuit ? »

    De Adrien Candiard 

     

    Résumé :

    Les chrétiens sont-ils le dernier espoir d’un monde qui a perdu toute espérance ? Oui, espérer est leur profession de foi depuis deux mille ans. Non, eux-mêmes sont désespérés en ce début de troisième millénaire.Et si espérer, c’était d’abord renoncer à tous les faux espoirs? Refuser d’idéaliser le passé. Refuser de sublimer l’avenir. Dire non au fantasme de la restauration glorieuse et non à l’illusion de l’exaltation apocalyptique.L’espérance des chrétiens n’a qu’une chose à offrir : la vie éternelle. Une vie qui ne commence pas après la mort. Une vie qui débute maintenant.Une autre manière de vivre, de vivre sa mort, de mourir sa vie. Jamais, sans doute, renaître n’a été aussi simple, clair, aisé qu’avec ce livre.

     

    L’espérance chrétienne espère nécessairement contre toute espérance, c'est-à-dire contre tous les faux espoirs qui nous protègent d'une rencontre rugueuse avec le monde réel où Dieu nous attend. Comment pourra-t-il nous sauver si nous sommes ailleurs ? Comment même pourrons-nous comprendre ce qu'est le salut, ni pourquoi il nous faut être sauvés, si nous ne regardons pas le monde réel, avec le mal qui le traverse, en face ?

     

    Le  Dieu vivant reste libre de nos définitions : c’est ce qui le rend tout à la fois un peu perturbant et tout à fait merveilleux.

     

    On ne possède pas Dieu comme on possède une voiture ou de l'argent en banque, mais plutôt comme on «a» un ami: on le connaît, certes, mais on n’en a jamais fait le tour. Il peut toujours nous surprendre. Il est toujours à la fois connu et inconnu, et plus nous le connaissons, plus nous prenons conscience de sa part de mystère. Commencer à le connaître, c'est comme plonger dans l'océan : on n'est pas près d'avoir épuisé la question.

     

    (L’évêque d'Hippone) souligne que Dieu est la seule réalité que nous pouvons à la fois posséder et continuer à désirer dans le même temps. Dieu est à ce titre le seul objet d'espérance qui ne déçoit pas, parce qu'il ne cesse pas d'être une espérance quand il devient une possession.

     

    Les trois vertus théologales - la foi, l'espérance et la charité - nous proposent chacune une manière de posséder Dieu. La foi possède Dieu comme Vérité, la charité le possède comme Bien. La voie ouverte par l'espérance, c'est la possession de Dieu comme salut; c'est ce qu’on appelle plus communément la vie éternelle.

     

    Espérer, c’est quelque chose de très concret : c’est croire que Die nous rend capables de poser des actes éternels. Que, quand nous aimons, cet amour n'est pas simplement un beau sentiment dans une marée d'absurdité vouée à la mort, mais une fenêtre que nous ouvrons sur l'éternité. Car ces actes éternels, ces actes que nous pouvons faire et dont le fruit est éternel, ce sont bien sûr les actes d'amour, les seuls qui comptent. Ce sont eux qui construisent, dans notre monde déjà, l'éternité, le Royaume de Dieu.

     

    Espérer, ce n'est pas se mentir ou se voiler la face, mais croire que l'amour est plus solide que le reste, parce que, contrairement à nos ambitions, nos richesses, nos conflits, tout ce qui nous distrait trop souvent de l'essentiel, l'amour a les promesses d'éternité. Il ne passera jamais, saint Paul nous le dit. Quand le monde qui nous entoure nous fait peur, l'espérance chrétienne ne nous dit pas de rester là à pleurnicher parce que tout va mal, ni de sourire bêtement parce que tout irait bien; elle ne nous invite pas à attendre que Dieu détruise ce monde-là pour en construire un autre ; elle nous pose une question très simple : comment faire de tout cela une occasion d'aimer davantage ? C'est la question que nous devrions nous poser devant toutes les nouvelles, les bonnes comme les mauvaises, celles du journal télévisé comme celles du téléphone personnel. Comment puis-je en faire une occasion d'aimer ?

     

    Dieu : il sait que, si nous ne recevons pas d'abord en surabondance, nous serons trop timides pour donner. Alors il donne, en espérant que cela finira par déborder de nos mains, de nos poches, et que nous nous mettrons nous aussi à donner, à partager, à vivre avec les autres cette joie que nous ne cessons de recevoir. fin

     


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  • Extraits du livre de Jacqueline KELEN

    « Histoire de celui qui dépensa tout et ne perdit rien. »

     

     

    Conclusion

     

    Il faut donc en convenir : la miséricorde divine se situe bien au-delà de la récompense et du pardon. Elle n’est nullement troublée ni entachée par les multiples fautes des mortels. L’amour véritable est pur don, et non pardon. Entièrement gratuit, il ne fait pas les comptes, il n’a ni à réprimander ni à excuser. Il rayonne et toute ombre, toute tristesse s’évanouisse  en sa présence.

     

    L’Amour et la Justice ont une même finalité : aboutir à la réconciliation, à la paix, à la concorde.

     

    Le parcours du Prodigue est celui de toute âme arrivée en ce monde, tombée en un pays bien éloigné du Ciel : il lui faut frayer sa voie entre justice (le frère) et miséricorde (le père) se confronter à l’une et à l’autre. La justice se montre imparable, inévitable : elle décrète et tranche. La miséricorde, elle n’a rien d’assuré : imprévisible, elle survient soudainement, elle est pure grâce.

     

    La parabole de l’enfant prodigue ne raconte pas l’histoire d’un homme ordinaire, mais le parcours d’un être singulier, accédant après diverses épreuves à sa dignité et à sa liberté en renouant avec sa filiation divine. Plus encore, il s’agit de l’aventure de l’Âme venue ici-bas, qui se grise et s’éparpille parmi les plaisirs de l’existence terrestre, puis se réveille et entreprend de retourner à l’éternelle demeure.

     

    Lorsqu’on a le sentiment d’avoir échoué, d’avoir manqué à son devoir spirituel, il faut un fier courage, beaucoup d’amour et une vive espérance pour se présenter devant le père céleste. Ces vertus comptent beaucoup plus que la honte et le remords. Aussi le père montre-t-il une joie et une tendresse débordante envers le fils qui a failli mourir au loin. ( Jacqueline Kelen) Fin

     


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  • Extraits du livre de Jacqueline KELEN

     

    « Histoire de celui qui dépensa tout et ne perdit rien. »

     

     

    Avec l’âge, mes gestes deviennent maladroits, mes pas imprécis. J’ai perdu mon agilité à filer la laine, à confectionner des gâteaux au miel et lorsque vient le soir mes yeux clignent et s’embuent. Quoi qu’en dise le saint Livre, la vieillesse n’est pas enviable même si elle ouvre à la sagesse. Elle  nous dépouille de tant de choses, de la vigueur et des plaisirs du corps, de ses attraits, elle nous impose, avec la faiblesse, des limites de plus en plus resserrées. On se courbe, on s’amenuise, on marche moins loin et moins longtemps, on se couche avant que le soleil disparaisse même si on a du mal à s’endormir… Mais il est une chose qui ne diminue pas, bien au contraire, c’est la sensibilité : un rien fait monter la larme à l’œil, un rien fait trembler de bonheur ou de crainte. La vieillesse ressemble aux roseaux et aux papyrus qu’un moindre souffle agite et qui un jour, devenus secs, cassent soudain sous les doigts. Sa seule beauté loge dans ce tremblement au cœur, aux mains et aux paupières. Certains y lisent l’annonce du déclin, moi je sais que ce sont les signes d’un amour qui n’est jamais défait. (La mère)

     

    Qui n’est jamais tombé ne connaîtra pas la fierté de se relever, la joie de repartir. La pire épreuve peut devenir une porte ouverte à l’intérieur de soi : on fait silence, on s’interroge, on avance vers la profondeur. La pitié n’a rien de dédaigneux, elle révèle la part d’humanité commune à tout vivant, une part souvent endommagée. Celui qui éprouve cet étrange sentiment-ou est-ce une vertu majeure ? – ne se sent ni rehaussé ni épargné. Il a  simplement envie de serrer sur son cœur, d’héberger en son cœur la foule des hommes, errants, les agneaux qui tremblent et les fleurs éphémères, tout ce monde si beau qui un jour passera. (Le serviteur).

     

    Dieu, quelle clarté en cette nuit ! Les visages de tous brillent à la lueur des lampes, à la joie des retrouvailles. Tout est bien. Me voici renouvelé. Louez soit l’Éternel ! (le fils)

     

     


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  • Extraits du livre de Jacqueline KELEN

    « Histoire de celui qui dépensa tout et ne perdit rien. »

     

     

    Mon fils, mon fils bien-aimé, c’est bien toi. De loin je te reconnais malgré ta maigreur et ta démarche claudicante, je te vois te hâter, j’entends battre ton cœur, il résonne comme une harpe dans ma poitrine. Comme tu m’as manqué, cher enfant. Les ans ont passé sans ternir ton image, sans émousser mon attente. Depuis ton départ, le mûrier à l’ombre bienfaisante a élargi sa frondaison, les troupeaux ont prospéré et les grappes violettes foulées au pressoir ont donné un vin vigoureux, mais tu manquais à ce festin, tu manquais à ma joie.

    Ta mère n’a cessé de t’attendre, elle aussi, en gémissant. Elle te voulait pour elle, moi je te veux pour toi. Tu as grandi, tu as mûri, tu as pris la mesure de ta liberté et de tes limites et c’est bien ainsi. Surtout, n’aie regret ni honte, ne te sens pas coupable puisque tu reviens, puisque tu es là. Même si tu te prosternes en pleurs, je n’ai pas idée de la moindre punition à ton encontre et je n’ai rien à te pardonner. L’amour que je te porte est bien au-delà du châtiment et du pardon, il ne règle pas des comptes ni ne remet les dettes, il se tient bien plus haut que ces calculs d’usurier. Tu es revenu, riches de tes rencontres et de tes épreuves. Ne pleure pas mon enfant, ne mêle pas tes larmes amères à mes pleurs de joie. Je te retrouve, je te serre dans mes bras, mais tu n’es pas captif, ici tu es délivré de toute entrave, de toute malédiction, je te hisse vers la lumière. (Le père)

     

     

    L’homme vit peu de temps et il se livre à ses passions, à ses folies, sans essayer de les gouverner, de les comprendre. Il se laisse emporter par la colère, la jalousie, l’avidité ou l’ambition. Tous ces démons encombrent le monde, semant la discorde et la zizanie. Tes qualités sont très précieuses et j’apprécie ta présence à mes côtés, ta loyauté indéfectible. Mais mon amour de père  t’est donné dès le départ, tu n’a rien réclamé en cet instant. En restant auprès de moi tu as choisis ta voie comme ton frère à décider de la sienne en quittant la maison, et tous les deux je vous ai bénis. Ou bien tu te sens-tu- malheureux parce que j’embrasse quelqu’un que je devrais réprimander et punir ? Comment si la sollicitude et la tendresse étaient réservées aux seuls justes, aux hommes impeccables, alors que l’être humain est avant tout fragile, faillible et digne de pitié. Mon rôle de père consiste à panser, soigner et relever celui qui s’est égaré et meurtri sur le chemin. Pourquoi le cœur de l’homme est-t-il si ombrageux ? Que trame-t-il de si compliqué ? Pourquoi l’aîné se compare t-il  au cadet et réclame davantage ? Rien n’est fixé à tout jamais. Il n’est point de lac qui ne rêve un jour de devenir fleuve et la rivière vagabonde  ressent un jour l’envie de se reposer en se perdant à l’estuaire ou en devenant un calme étang.

    (Réponse du père au frère jaloux)

     

    Histoire de celui qui dépensa tout et ne perdit rien. (4)

    Colmar, décembre 2021


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  • Extraits du livre de Jacqueline KELEN

    « Histoire de celui qui dépensa tout et ne perdit rien. »

     

     

    Le plus humble travail peut être source de fierté et de gratitude. (Le vieux Serviteur).

     

    Moi, on ne me voit jamais, on ne me croit guère ou bien on rit quand j’annonce des choses à venir. Oh, ce n’est pas moi qui décide d’apporter une bonne nouvelle, de prévenir d’un danger, mais c’est avec bon cœur que je remplis scrupuleusement ma mission. Ce faisant, je porte secours aux hommes tout en obéissant au Seigneur.(L’Ange du retournement)

     

    Maintenant que je reviens vers toi, ce long séjour en des contrées étrangères ne me semble plus un échec. J’ai festoyé et joué aux dés, j’ai ri aux éclats et dépensé d’énormes sommes pour offrir aux femmes qui m’accueillaient des étoffes étincelantes, des anneaux d’or, des escarboucles. Et j’ai connu ’amour d’une belle passante, j’ai pleuré de la perdre et ne me suis pas consolé. Mais l’amour est resté. J’ai eu froid, j’ai eu faim, j’ai marché dans la boue avant de ressentir, telle une épine dans le cœur, le mal de ta demeure, de ta maison de paix qui peut- être ne m’attend pas. Oui, j’ai beaucoup perdu, j’ai rudement appris, mais ce n’est pas une défaite. Me voici dépouillé, nu, étrangement léger, je n’ai à te donner que mon grand dénuement.

    Suis-je pauvre pour autant? Le vrai pauvre, à mon sens, est celui à qui rien ne manque, qui n’attend rien d’autrui, qui est plein de lui-même, et il est bien à plaindre. Moi, avec mon âme assoif­fée de retour, je suis riche de ma belle espérance, de mon désir immense de te retrouver, d’être à nouveau ton fils très cher. Il est puéril de croire que pendant son absence les êtres et les choses que l’on a quittés restent intacts, sans bouger, comme s’ils vous attendaient, comme si le temps s’arrêtait. Oui, c’est bien ridicule. Mais, en dépit des ans et des douleurs, je le crois, je l’espère follement, là-bas ils attendent mon retour, Mère guette encore chaque jour l’horizon et Père invoque le Seigneur miséricordieux.

    ( Le Fils)

    Histoire de celui qui dépensa tout et ne perdit rien.(3)

    Colmar 31 décembre 2021

     



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